La petite fille qui lisait dans le gros fauteuil bleu

C’est une femme de 34 ans qui attend le train en gare de Bois-Colombes. Mais c’est une enfant qui enregistre chaque minute et chaque bruit, pensant ne plus jamais les vivre de la même façon à l’avenir, si elle devait repasser par là.

C’est une femme de 34 ans qui a dit chaleureusement au revoir à son père, avec le sourire et un mot rassurant, oui je t’écris quand je suis rentrée, repose-toi, mais c’est une enfant qui, une fois les talons tournés, a retenu ses larmes pour savourer « sa » rue des Bourguignons une dernière fois.

C’est une femme de 34 ans qui a fait quelques cartons aujourd’hui, mais c’est une enfant qui a fait un ultime tour des pièces « une dernière fois » pour étreindre de tout ses bras ce grand pavillon qu’elle aime tant.

Escaliers dévalés, spectacles improvisés dans le salon, opéras écoutés à un volume indécent par son père et sa grand-mère, dont les notes s’envolaient du rez-de-chaussée au deuxième étage, frigo qui grince, odeur de parquet, bruits de la rue, odeur de cigarette et de parfum mêlés de l’élégante grand-mère aux boucles accroche-cœur, L’écume des Jours découvert dans la bibliothèque, memoire de maîtrise rédigé dans l’imposant bureau du grand-père, salle de bain au bleu improbable, petite fille qui regarde par la fenêtre le chat se rouler par terre de satisfaction au soleil …

C’est l’enfant qui revoit défiler ses souvenirs, et c’est la femme de 34 ans qui les grave, maladroitement, pour faire vivre éternellement cette enfant.

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